Khaled Satour
La levée de boucliers qui a suivi le renvoi d’un lycée de Bejaia de la jeune fille portant une robe kabyle était à mon avis largement surfaite. Qu’elle se prolonge par un appel lancé sur les réseaux sociaux à faire du 27 septembre la journée du port de la robe kabyle relève de la surenchère identitaire inutile et déplacée.
A cela deux raisons :
1° - La première est que le renvoi de l’élève, aussitôt désavoué par le chef de l’établissement, fut l’initiative stupide et isolée d’une personne dans laquelle il était aussi stupide de voir une hostilité de l’école algérienne à l’endroit de la tenue traditionnelle kabyle, des Kabyles et de la Kabylie. Établir, comme l'ont fait certains, un parallèle entre cet incident isolé et l’interdiction de l’abaya en France édictée par décision du ministre de l’Éducation nationale et en application d'une loi à portée générale n’avait pas de sens.
2° - La deuxième raison, qui me paraît la plus importante, c’est que, au vu de la tenue choisie par la jeune fille telle qu’on la voit sur les vidéos (Cf. captation ci-dessus), il est vraisemblable que le censeur qui lui a interdit l’entrée de l’école ne réprouvait pas tant le fait que la robe qu’elle portait fût kabyle que le fait qu’elle ne la couvrait pas suffisamment : l’absence de manches et le cou dénudé, ajoutés aux cheveux relâchés, ont sans doute heurté une certaine conception de « la décence » qu’il partage malheureusement avec un trop grand nombre de ses compatriotes, en Kabylie et ailleurs.
Sans qu’il faille lui donner plus de portée qu’il n’en a, cet incident est donc une illustration des restrictions imposées aux femmes et jeunes filles algériennes au nom des normes religieuses machistes qui étouffent la société et n’a selon toute probabilité rien à voir avec une hostilité vouée par l’institution scolaire aux Kabyles.
Mais est-il si surprenant qu’un contresens aussi grossier ait été si largement répercuté ? Non, car il est le résultat, prêt à se reproduire au moindre prétexte, de l’extrême crispation identitaire dans laquelle s’enferment beaucoup trop d’Algériens au détriment de la plus élémentaire capacité de jugement. Les réseaux sociaux amplifient ce phénomène à l’excès : en particulier, la paranoïa confinant au dolorisme qui y est sans cesse exprimée par certains défenseurs de la culture kabyle et amazigh est proprement insupportable.
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