vendredi 21 avril 2023

« UNE JUSTICE DANS NOS CŒURS »

 

Khaled Satour


L’aïd el fitr de l'année 2023, c'est aujourd'hui. Il célèbre la miséricorde et le pardon. Chaque musulman est appelé à en faire don autour de lui, sans discrimination. Mais c’est d’abord un jour de fête fait pour communiquer la joie et l’espoir.
 
Une journée de joie partagée à gagner contre la tristesse que suscite l’injustice. Une journée dédiée à la solidarité (qui est une autre façon de dire la miséricorde) avec ceux parmi les Algériens qui la vivent entre les quatre murs de leur prison, pour avoir cru qu'ils étaient libres de s'exprimer. Un gain fragile, une victoire à la Pyrrhus contre l’arbitraire mais qui peut constituer un bon prélude.
 
Dans le film « Le Verdict » de Sidney Lumet, le juge est décidé à appliquer la loi du plus fort, et pour cela à écarter toutes les dépositions et les pièces à conviction qui y font obstacle. Il exige des membres du jury de ne pas tenir compte de témoignages qui le dérangent, de faire comme s’ils n’avaient pas entendu.
 
Ce magistrat renvoie le jury au rang de spectateur, un peu comme nous Algériens sommes réduits au rang de spectateurs des décisions de justice par lesquelles des dizaines de nos compatriotes sont condamnés, en notre nom, à de lourdes peines de prison qui les privent de la joie de vivre cet aïd avec leurs familles. A l'exemple du juge dans cette fiction, qui en dit long sur le système judiciaire américain, les juges algériens tirent d’une loi devenant chaque jour plus injuste les arguments de l’arbitraire.
 
Dans ce court extrait, regardez et surtout écoutez l’avocat, joué par Paul Newman, en appeler à la justice contre le droit, contre la cour, les magistrats et leur cérémonial, pour interpeller les jurés et les réintégrer dans la partie :
 
« Vous êtes la loi. Pas un livre de droit, pas les magistrats ni la statue de marbre de la justice ou le cérémonial de la cour. Ce ne sont que les symboles de notre désir d’être justes. Mais ils sont en fait une prière, une fervente prière. Dans ma religion, on dit : "agis comme si tu avais la foi et alors la foi te sera accordée". Si nous voulons avoir la foi dans la justice, il nous suffit seulement de croire en nous-mêmes et d’agir avec justice. Et je crois qu’il y a une justice dans nos cœurs ».
 
« Avoir foi dans la justice qui est dans nos cœurs ». En ce jour où il n’est pas saugrenu d’invoquer la foi, c’est un message qui peut être reçu par les Algériens, afin qu'ils ne fassent pas comme s’ils n’avaient pas vu ni entendu.
 
Aïdkoum mabrouk.

mercredi 19 avril 2023

LES CHRÉTIENS DE JÉRUSALEM : DU « GENTILE ZIONISM » AUX CRACHATS DES COLONS JUIFS


Khaled Satour

Sur de nombreuses vidéos, dont cette photo est extraite[1], la nouvelle mode en usage chez les colons juifs ultra-orthodoxes à Jérusalem : cracher sur les chrétiens.

Et l'indifférence est totale chez les Occidentaux à toutes les provocations et attaques subies actuellement par les chrétiens de Palestine dont le sort avait servi d’alibi au 19e siècle à leur politique d’annexion de la terre sainte qu’ils devaient couronner en livrant le pays et ses habitants au sionisme.

Tout au long du 19e siècle, les Français et les Anglais avaient tenté d’instrumentaliser les chrétiens de la terre sainte contre l’empire ottoman, pour tenter d’imposer à Jérusalem l’influence du catholicisme pour les premiers, du protestantisme pour les seconds.

Car c’est au nom de la religion et avec une référence explicite aux croisades, mais à des fins géopolitiques, que les puissances européennes ont déclenché au 19e siècle le processus des interventions qui devait conduire à livrer la Palestine tout entière au sionisme.

Les pressions exercées par chacune de ces puissances auprès d’un État ottoman déclinant se sont conclues en 1853 par l’octroi des clés de l’Église de la Nativité à Bethléem aux catholiques, à la demande de la France appuyée par la Grande-Bretagne. La Russie orthodoxe avait réagi vivement à cette décision qui annulait un firman ottoman datant du milieu du 18e siècle attribuant ce privilège à l’église orthodoxe.

Le Tsar Nicolas 1e ayant menacé Istanbul d’annexer les provinces roumaines rattachées au califat, la France et l’Angleterre, alliés aux Ottomans, ont déclenché contre la Russie la guerre de Crimée qui, au bout d’un an et au prix de la mort de dizaines de milliers de personnes, a permis aux deux puissances occidentales d’occuper Sébastopol.

Les Britanniques avaient jusque-là mobilisé au service de leur politique impérialiste la doctrine dite du « gentile zionism » (sionisme chrétien) afin de convertir l'infime minorité juive et les chrétiens de Palestine au protestantisme. Leur argument était que cette religion s’était substituée au judaïsme en tant que religion élue de Dieu, et que, si les juifs étaient les premiers à qui Dieu avait promis la terre sainte, les protestants étaient désormais leurs héritiers légitimes.

Les missionnaires anglicans ont été chargés de diffuser cette doctrine de l’« État chrétien en Palestine » en tant que « Nouvelle Sion » mais les Juifs n’en ont pas été convaincus et, entre les églises de Palestine, cette doctrine a provoqué des affrontements sans que le résultat escompté ne soit obtenu.

C’est la raison pour laquelle la Grande-Bretagne a brutalement changé de politique au lendemain de la 1e guerre mondiale. Alors que les accords Sykes-Picot, conclus en 1916 par anticipation de la défaite des pays de l’axe auxquels la Sublime Porte était alliée, ne s’étaient pas prononcés sur l’attribution de la Palestine à la France ou à l’Angleterre, celle-ci devait rendre publique en novembre 1917 la fameuse déclaration Balfour promettant aux juifs un foyer national en Palestine.

Cette déclaration avait fait l’effet d’une bombe car jusque-là la confrontation des puissances à propos de la terre sainte était présentée comme une affaire exclusivement chrétienne. La déclaration Balfour introduisait soudain un nouveau protagoniste, les juifs sionistes qui avaient profité de la grande guerre pour gagner en influence auprès des Anglais et qui dès lors étaient assurés de remporter la mise.

Le plus ahurissant est que l'Angleterre a ainsi disposé de l’avenir de la Palestine, églises et fidèles chrétiens inclus, alors qu’elle n’y exerçait encore aucun pouvoir reconnu (ni protectorat, ni mandat).

Un siècle plus tard, alors que les méfaits de la monstruosité sioniste atteignent un paroxysme, les puissances occidentales se détournent des Palestiniens chrétiens livrés, comme leurs compatriotes musulmans, à la répression, aux humiliations des colons juifs, aux profanations de leurs cimetières et à la dévastation de leurs lieux de prière.